L’Album de la « Nation Belgique »1, couvrant la période 1651-1674, presque au terme de l’existence de l’université à Dole, apporte un éclairage sur son ultime rayonnement. Willem Frijhoff a repris la recherche qu’Émile Longin avait réalisée en 1892, en a précisé l’analyse et corrigé quelques erreurs. Son étude a été complétée par Charles de Zutter2.
Il s’agit d’un splendide manuscrit sur papier et parchemin, bien relié en maroquin avec des restes de fermoirs, et orné de peintures en pleine page3. Soulignant la fréquentation accentuée de l’université par les « Néerlandais » dans le second quart du XVIIe siècle, il offre un bon témoignage de son attractivité. Les étudiants de ce pays y sont si nombreux qu’ils constituent, fin 1651, une « nation ». Cette structure prête ses livres, avance de l’argent et possède une fonction judiciaire. Pour bénéficier de ces aides, les étudiants doivent être catholiques et originaires des Pays-Bas espagnols et des Provinces-Unies. Ils doivent s’y inscrire et payer un droit d’entrée, bien que certains soient récalcitrants sur le principe.
Il est difficile de connaître le nombre d’étudiants présents simultanément à Dole. Leur durée de séjour n’est pas longue. Ces jeunes “Néerlandais” viennent chercher à Dole leurs grades de fin d’études, qu’ils obtiennent parfois peu de temps après leur immatriculation. Plus de 40 % sont de Louvain, et surtout d’Anvers et de Bruxelles. La courbe du nombre d’immatriculés reflète la prospérité de la nation. Elle est stoppée par la double invasion française de 1668 et de 1674 (sièges, guerres), juste avant la chute de Dole, le 16 juin 1674, et l’annexion qui suit. Les étudiants les plus nombreux sont originaires des Pays-Bas espagnols et de la Gueldre supérieure. Un sur dix seulement vient d’autres pays, essentiellement des Provinces-Unies et des pays de l’Empire. Sur les 473 étudiants recensés par Willem Frijhoff, les deux tiers proviennent de Bruxelles (86), de Gand (72), d’Anvers (57), de Bruges (29) et de Malines (21). Progressivement, la part des Brabançons diminue alors que celles de Flandre orientale, et surtout de Flandre occidentale, augmentent, sans doute en raison de l’évolution économique générale.
Ce recrutement “néerlandais” revêt un caractère élitiste, fortement nobiliaire ou patricien. Certains étudiants vont jusqu’à usurper leur origine familiale en se faisant passer pour des nobles…