Jean Crai, diplômé de la maîtrise ès arts le 7 juillet 1549

Danielle Ducout et Jacky Theurot – Source : collection particulière

Le 7 juillet 1549, le recteur Étienne Des Barres, maître ès arts et sans doute doctorant, remet son diplôme à Jean Crai. Cet acte sur parchemin, authentifié par le sceau et le contre-sceau de l’université, est un témoignage rare du cérémonial accompagnant l’attribution des diplômes.

Le recteur Richard Receveur entouré des sept vertus cardinales, 1540. La figure du recteur est présentée, vêtu d’écarlate, portant un gant et un rameau végétal, au centre d’un portique. Il est accompagné des sept vertus portant leurs symboles : la Prudence, la Justice, la Force, la Tempérance, l’Espérance, la Foi, avec le blason du recteur, et la Charité portant le sceau à la main de Dieu de l’université. La sentence « Virtute duce », la vertu mène, surmonte l’ensemble. Bibliothèque municipale de Besançon, Ms. 983, f°1.

Après le rappel de son cursus à l’université de Dole, « et en d’autres lieux », de son succès au baccalauréat en arts, le vice-chancelier de l’université, représentant l’archevêque, attribue à Jean Crai le grade de la licence. Puis Antoine Brugnard, docteur en arts et professeur ordinaire en la faculté des arts, confère au lauréat le grade suprême de la maîtrise. Le nouveau diplômé présente aussitôt sa première leçon dans l’auditoire des lois décoré pour la circonstance.

Lors de cette cérémonie publique, sont là nombre de docteurs connus, dont le célèbre professeur de théologie Antoine Lulle, des professeurs ordinaires en droit canon et en droit civil, rencontrés comme étudiants sur les bancs de l’université et issus de grandes familles doloises, tel Louis de Saint-Mauris, diplomate au service de Charles Quint (1500-1558). On note la présence du vice-prieur du collège Saint-Jérôme associé à l’université depuis la fin du XVe siècle, et de l’ensemble des étudiants.  1

Nous Etienne des BARRES1 écuyer, revêtu de la dignité magistrale dans l’illustre faculté des arts, recteur de l’université de Dole au diocèse de Besançon, à tous ceux qui examineront les présentes lettres, salut. 

Parce que la raison et l’équité conduisent à produire témoignage et à honorer par-dessus tout la sainte vérité, par la teneur des présentes nous certifions que très studieux et lettré homme Jean CRAI2 de Saint-Marcel3 au diocèse de Besançon a étudié dans cette faculté des arts et dans d’autres lieux et qu’ensuite il a subi les épreuves du baccalauréat lors d’un examen sérieux dans ladite faculté des arts sous le contrôle de messires les régents de ladite faculté, et qu’enfin après un examen rigoureux il a été trouvé compétent et capable d’obtenir le grade prestigieux de la licence dans ladite faculté, et il fut confirmé par le jury et par tous sans aucune contestation, et le témoignage des régents et du scribe qui nous a été rapporté faisant foi a été dûment enregistré et spécialement noté. 

C’est pourquoi le grade de la licence, selon la louable coutume de l’université, a été conféré au susdit Jean CRAI par distingué et savant homme messire Pierre FAROD  docteur en deux droits, chanoine de l’église de Dole, très méritant vice-chancelier, représentant de très-vénérable en Christ père et messire François BONVALLOT abbé commendataire perpétuel des monastères Saint-Pierre de Luxeuil et Saint-Vincent de Besançon et administrateur de l’archevêché dudit Besançon au nom de très révérend seigneur messire Claude DE LA BAULME élu archevêque dudit Besançon, et conservateur des privilèges de la dite mère université de Dole, délégué spécialement par le Saint Siège pour honorer cette représentation destinée à conférer au susdit le grade de la licence selon le rite et la louable coutume de la dite université. Lequel messire Pierre FAROD conféra le susdit grade de la licence au susdit Jean CRAI impétrant et postulant et le reçut dans l’auditoire public de l’université spécialement orné à cet effet, et en présence des docteurs dûment réunis et convoqués au son de la cloche, après que Jean CRAI eut prononcé publiquement les serments habituels.    

Et dans le même temps, le susdit Jean CRAI désormais licencié dans la dite faculté  aspirant à de plus grandes perspectives reçut solennellement de très érudit homme messire Antoine BRUGNARD4 docteur en arts et professeur ordinaire en la faculté des arts le grade suprême du magistère représenté par la perruque et les autres traditionnels ornements selon le rite desdites facultés des arts, et fut publiquement et ouvertement nommé et déclaré à haute et intelligible voix maître ès arts par le même messire BRUGNARD, et il monta à la chaire magistrale où il prononça en public sa première leçon sous les yeux de la susdite université. 

Pour attester de la sincérité et de la véracité de ce témoignage,  nous avons demandé au secrétaire de ladite université de rédiger et soussigner les présentes lettres, d’y apposer le grand sceau de l’université et avons ordonné et fait ajouter encore la marque du petit sceau pendant. Donné et fait à Dole le 7 du mois de juillet l’an de la naissance du Seigneur 1549, en présence de messires les docteurs Antoine LULLE professeur public de théologie, Pierre VAUCHARD, Guillaume PETIT professeur en droit canon, Louis de BOISSET et Louis de SAINT-MAURIS professeurs ordinaires de droit civil, Jean CHAPPUIS, Pierre ROID, appelés docteurs en droits, religieux homme messire Jacques MAUGIER licencié en droit canon, vice-prieur du collège Saint-Jérôme, avec les nobles et généreux adolescents Antoine de CORNOD protonotaire abbé désigné de Saint-Paul de Besançon, François de CORNOD, Claude de LA VILLETTE, et enfin maître Claude MICHEL, Claude BONOQUET maîtres en arts et de nombreux présents, tant bacheliers en droit et en arts qu’étudiants convoqués à bon droit comme il a été dit ci-dessus    

                                                                                           [signé :] J. Colard 

Blason de Claude de La Baume (1534-1584), cardinal, archevêque de Besançon. Bibliothèque municipale de Besançon, Ms. 984, f°125.
Notes :
1 – Etienne Des Barres : Famille tirant son nom du village d’Esbarres proche de Saint-Jean de Losne, dont une branche s’établit au XVe siècle à Salins. Etienne est l’un des quatre fils de Pierre Des Barres (1485-1565), de Salins, chevalier, seigneur du Perret et de Parcey, qui avait été inscrit à la matricule de l’université de Dole par le recteur Jacques Girard le 21 mai 1507 (cl. 125, f. 76v/69v). Elu procureur de la faculté des lois le 5 avril 1511 (rectorat Silvan, cl.144, f.81/80) puis procureur général le 12 mai 1512 (rectorat Sasbout, cl. 149, f° 88/86). Il a sans doute obtenu son grade de docteur en droits dans une autre université (Louvain ?) mais pas en Italie, car contrairement à deux de ses fils, il n’est pas mentionné par Nicole Bingen. Il a été successivement avocat fiscal au bailliage d’Aval à Salins (1517,1518), bailli de Vennes et de Vercel (1523) conseiller au parlement de Dole (1530) et sera nommé et installé président du parlement de Dole le 12 novembre 1550. Anatoile et Louis Des Barres, frères d’Etienne, après des études à Padoue, Bologne et Pavie, obtiendront leurs doctorats en droits à Ferrare en 1552 et 1553 (N. Bingen, « Aux escholles d’Outre-Monts » : étudiants de langue française dans les universités italiennes (1480-1519) Français, Francs-comtois, Savoyards. Genève, Droz, 2018 (Travaux d’Humanisme et Renaissance n° DXCVI). T. I, p.889-891) 2 – Jean Crai : compte tenu de la variabilité de l’orthographe des noms propres au XVIe siècle, il est possible que le patronyme Crai soit orthographié dans d’autres documents Cret ou Ducret… 3 – Saint-Marcel : près de Jussey (nord-ouest de l’actuel département de la Haute-Saône) 4 – Antoine Brugnard  (cf.p.xx) : son nom évoque un clerc de Montbéliard, ancien étudiant de l’université, devenu chanoine à Saint-Maimboeuf de Montbéliard au milieu du XVe siècle.  
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