Les études médicales et l’exercice de la médecine sont profondément modifiés à la Révolution française. L’Assemblée constituante abroge les corporations et instaure la liberté de l’exercice des professions. La Convention, quant à elle, supprime les académies, les sociétés royales puis les facultés. Désormais, n’importe quel individu peut, en théorie, se prévaloir de la fonction de médecin, ce qui ouvre une ère de pratique médicale sauvage.
Mais cette image d’une Révolution française faisant disparaître toute forme d’enseignement de la médecine est cependant simplificatrice. À Besançon, comme dans de nombreuses villes, des cours informels et gratuits prennent le relais des enseignements des défuntes universités de l’Ancien Régime. Ils se justifient par une lutte contre le charlatanisme médical, mais aussi, en pleine période de guerres révolutionnaires, par le besoin de former des médecins militaires. Jacques Foucher (du Cher) (1753-1819), conventionnel en mission, tente même d’établir une véritable école de médecine à Besançon, sans succès.
Un premier pas vers une reconstitution académique des études de médecine est fait par la loi du 14 frimaire an III (4 décembre 1794) qui crée trois écoles de médecine : Paris, Montpellier et Strasbourg. À Besançon, une véritable école libre de médecine prend progressivement corps après que la société de médecine a nommé six de ses membres pour la constituer1. Quelques cours se tiennent brièvement à la nouvelle école centrale du Doubs, installée dans le collège des jésuites. Un enseignement est ensuite mis en place, de manière plus organisée, à l’hôpital Saint-Jacques, rebaptisé « hôpital de la Montagne », où des professeurs de la faculté de médecine de l’Ancien régime et des médecins militaires y participent activement.
L’administration centrale du département du Doubs soutient cette action. Le 23 brumaire an VI (13 novembre 1797), elle confirme par écrit aux membres composant la commission des hospices civils de Besançon que les professeurs de médecine et de chirurgie continueront gratuitement leurs leçons et leur demande de bien vouloir tenir des cadavres à leur disposition2.
Programme des cours de l’École libre de médecine pour l’année 1803-1804. Archives départementales du Doubs, 1J755. L. Besançon.
Une campagne d’affichage précise l’organisation des cours de l’école libre de médecine de Besançon pour l’année 1803-1804 (figure 1). L’anatomie est enseignée par Pierre François Briot (1773-1826), chirurgien militaire ; la physiologie et la clinique externe, par Jean-François Thomassin (1750-1828), autre chirurgien militaire et médecin chef de l’hôpital de Besançon (figure 2) ; la pathologie interne et l’hygiène, par Jean-Baptiste Collard (1769-1837) et François Thiebault (1771-1840), deux anciens professeurs de la faculté de médecine. Le 14 brumaire an V (4 novembre 1796), une pétition de l’administration de Besançon demande la création d’une école de médecine et d’art vétérinaire pour cette ville : elle reste sans suite.
Portrait du docteur Jean-François Thomassin (1750-1828), anonyme du XIXe siècle. Besançon, Musée du Temps, Inv. 1909.2.68. Pierre Guenat.
La loi du 19 ventôse an XI (10 mars 1803) crée un corps de docteurs en médecine ou chirurgie et un corps d’officiers de santé, restructurant les études médicales. Les candidats docteurs effectuent quatre ans d’études dans l’une des trois écoles de médecine, fondées en 1794, et terminent par la soutenance d’une thèse, qui leur autorise un exercice national. Les officiers de santé sont, eux, reçus par un jury départemental, ce qui leur ouvre la possibilité d’un exercice dans le département en question. Le futur officier de santé effectue cinq à six années de pratique dans un hôpital ou de compagnonnage auprès d’un docteur en médecine ou trois ans d’études dans une école secondaire de médecine ou dans des « cours pratiques de médecine », structures nées à partir de 1806 de l’officialisation progressive des écoles libres révolutionnaires.
À Besançon, le décret du 7 août 1806, signé de Napoléon Ier, transforme l’école libre de médecine en « Cours pratiques de médecine, chirurgie et pharmacie », qui forment des officiers de santé.