De 1499 à 1530, Philippe le Beau et Marguerite d’Autriche administrent le comté de Bourgogne et veillent à la bonne marche de l’université de Dole1. Au fil des années, les maîtres et étudiants, protégés par les statuts de l’université, bénéficient de privilèges. Cela explique sans doute les mauvaises humeurs du corps de ville et des Dolois qui se plaignent souvent auprès du bailli et du Parlement, plus qu’auprès de l’archevêque Antoine de Vergy, acquis à la cause de l’université, fille de l’Église. Certains de ces édiles, issus de l’université comme François de Marenches, Jean Tirol, les conseillers comme Christophe Chaillot ou Jean de Saint-Moris, licenciés en lois, voire docteurs, peuvent cependant apprécier le statut des régents ou des docteurs-lisant.
Portrait de Philippe le Beau par un peintre flamand de l’école du Maître de la légende de Sainte Marie-Madeleine. Petit-fils de Charles le Téméraire et fils de l’empereur Maximilien Ier, Philippe le Beau (1478-1506), duc-comte de Bourgogne et roi de Castille. Il est le père de Charles Quint. RMN-Grand Palais (Musée du Louvre), INV 2085. Gérard Blot.
Même s’ils laissent une certaine liberté à l’université car le recteur et son collège restent les « maîtres à bord », le prince et l’archiduchesse marquent parfois leur insatisfaction. Ainsi, en 1503, Philippe le Beau rapporte un exemplaire des statuts pour calmer le courroux des universitaires dolois dont les privilèges et rentes sont partis en flammes en 1479. S’il ne peut contester la levée d’impôts ou d’obligations dans la ville au bénéficie de l’université (comme la garde des portes), le prince resserre toutefois le contrôle financier sur l’université, la délivrance des diplômes et la justice.
Portrait de Marguerite d’Autriche par Barend Van Orley, vers 1518. Petite-fille de Charles le Téméraire par sa mère, Marguerite d’Autriche (1480-1530) est la fille de l’empereur Maximilien Ier de Habsbourg. Tante et marraine de Charles Quint, elle gouverne les Pays-Bas et la Franche-Comté en son nom pendant la minorité de celui-ci. Bourg-en-Bresse – Musée du Monastère royal de Brou, Inv. 975.16. © Hugo Maertens.
Marguerite d’Autriche, déplorant un déclin de l’université, souhaite engager une réforme concernant l’assiduité des maîtres, la qualité des enseignants et la délivrance des diplômes. Lorsqu’en 1517, elle sollicite, une mission des quatre parlementaires sur ce sujet, le corps de ville abonde en son sens, mais la réponse n’est effective qu’en 1520. Meurtris par les critiques, le recteur Perdriset et l’université réagissent fermement, dès le printemps 1518, se plaignant de l’attitude de la population et du bailli Aymé de Balay. L’hostilité de ce dernier persiste jusqu’à sa mort en 1522, au point d’affirmer que les brillants maîtres italiens ne font pas mieux… Il est notamment reproché aux docteurs et aux régents d’effectuer des tâches privées au détriment de leur enseignement. Ces critiques sont cependant mal venues puisque c’est précisément le corps de ville qui leur demande souvent des examens, des enquêtes, des analyses juridiques. Ainsi, les délibérations municipales citent combien Christophe Chaillot, Louis de Marenches, Jean Heberling et d’autres sont souvent sollicités. De même, le fait que, du baccalauréat à la licence voire au doctorat, les diplômes sont rapidement obtenus, en une année, est une pratique dénoncée au début de 1501 par le conseil de ville, mais rencontrée dès le XVe siècle car Philippe le Bon s’en est déjà ému. Au XVIe siècle, il est fréquent qu’un recteur, ou un étudiant ne suive pas quarante mois d’étude pour obtenir le baccalauréat et autant pour la licence. Si les docteurs-lisant sont recrutés par les distributeurs, leur désignation incombe aux autorités princières. Les émoluments relèvent des receveurs, eux-mêmes désignés par le pouvoir. Cependant, les élections des recteurs, des procureurs et des conseillers sont bien le fait de l’ensemble du corps universitaire.
Lettres patentes de Marguerite d’Autriche du 24 mai 1517, duchesse et comtesse de Bourgogne, dame de Salins et de Chastelguyon. Ce document a été copié par le recteur Perdriset et inséré dans son registre matricule. Par ce mandement, qui fait suite à des plaintes répétées du conseil de ville, l’archiduchesse demande à ce qu’une enquête soit engagée par les quatre membres désignés du parlement à propos des problèmes relatifs à une moindre fréquentation de l’université. Il donne lieu à une réponse fort vive du recteur, également recopiée dans ce même registre. Bibliothèque municipale de Besançon, Ms 982 f°141/158.
Ce dernier est un microcosme où les liens familiaux sont étroits, comme chez les Chaillot, les Heberling, les La Tour, les Marenches ou les Phoenix. Très souvent, les fils suivent les pères, tels Jean et Louis de Marenches après Anselme, Nicolas après Odo de La Tour. Il en est de même pour les carrières ecclésiastiques comme chez les Carondelet, Boisset ou Granvelle. Dans cette société, le monde universitaire est proche des édiles municipaux, des administrateurs provinciaux, des autorités ecclésiastiques. La promotion de tel ou tel est scrutée à la loupe. Les protestations (pour moindre compétence, légèreté de certains maîtres…) ou les jalousies (entre Nicolas Thiébaut et Jean Perret, par exemple) peuvent cependant reposer sur des faits avérés.
Blason de Marguerite d’Autriche, duchesse douairière de Savoie. Marguerite d’Autriche est la veuve du duc Philibert II de Savoie (1480-1504). Le blason se lit ainsi : “parti, de Savoie et de l’écartelé d’Autriche, de Bourgogne moderne, de Bourgogne ancien et de Brabant, sur le tout de l’écartelé de Flandre”. Bibliothèque municipale de Besançon, Ms. 982, f°176.