Mercurino Gattinara (1465-1530)

Marie Barral-Baron

Né en 1465 au château d’Arborio, dans le Piémont, Mercurino Gattinara est issu d’une famille noble désargentée, qui a compté par le passé nombre de grands prélats, de ministres et d’ambassadeurs. Élevé par sa mère, lettrée, qui lui apprend à lire et à écrire, Mercurino est initié très jeune au savoir humaniste. Orphelin de père, en 1479, il est placé auprès de ses oncles qui le forment à la jurisprudence. À l’âge de treize ans, il s’inscrit à l’université de Turin, où il obtient son doctorat en droit en 1493. Ayant appris la pensée juridique classique, maîtrisant parfaitement les Institutes de Justinien et les Pandectes1, Gattinara est convaincu par ses lectures qui attribuent à l’empereur des pouvoirs universels. Cet héritage de la pensée juridique de l’Antiquité structure l’homme et explique sa conduite dans les affaires.

Mercurino Arborio di Gattinara, (1465-1530), chancelier de l’empereur Charles Quint. Bibliothèque nationale de France, IconEST2..

Le jeune homme commence sa carrière en obtenant la charge de conseiller du duc de Savoie, Philibert le Beau. Puis, à la mort de ce dernier en 1504, sa veuve Marguerite d’Autriche lui confie le soin de défendre ses intérêts patrimoniaux en Savoie, tâche qu’il accomplit avec rigueur et succès. Repéré pour ses talents de jurisconsulte, Mercurino se voit offrir la chaire extraordinaire de droit civil de l’université de Dole, réservée à un professeur étranger. Succédant à Anselme de Marenches, à Pierre Fabry et à Jean Vignod, Mercurino Gattinara s’y installe en 1506. Parmi ses élèves, l’érudition et l’éloquence d’un certain Nicolas Perrenot le frappent de manière définitive.

Très apprécié à la cour, Gattinara ne reste cependant pas longtemps à son poste de professeur, puisque Marguerite d’Autriche le nomme, en 1508, président du parlement de Dole. Il reçoit cette charge alors que cette même année 1508 marque le point de départ d’une intense activité diplomatique, qu’il mène dans différentes cours européennes. Il est en effet bientôt nommé ambassadeur de l’empereur Maximilien auprès de Louis XII. C’est lui qui négocie le traité de Cambrai et sillonne la France, l’Espagne et l’Empire. C’est seulement en avril 1511 qu’il peut enfin s’installer à Dole pour exercer sa fonction de président du parlement. Son séjour est toutefois entrecoupé de multiples déplacements, tant il jouit d’une solide réputation de juriste et de diplomate aguerri auprès des Habsbourg.

Les années 1515-1518 sont cependant plus difficiles, avec le décès de son épouse et l’animosité affichée de la noblesse de Franche-Comté, qui le voit comme l’instrument de la volonté centralisatrice de Marguerite d’Autriche. Fatigué, Gattinara se retire dans la chartreuse Notre-Dame des Grâces de Scheut, près de Bruxelles, où il apprend sa destitution de sa charge de président du parlement. Toutefois, son avenir politique est loin d’être achevé : le 7 juin 1518, Jean Le Sauvage, grand chancelier de l’Empire, meurt, et c’est Mercurino qui est choisi pour le remplacer. Chargé d’aider à l’administration d’un empire aux dimensions inédites, Gattinara nourrit son action en développant l’idée que Charles Quint, élu empereur à la mort de son grand-père Maximilien en 1519, est ce monarque choisi par la providence divine et chargé de présider au destin de la chrétienté. Le mythe de la monarchie universelle est relancé.


Notes :
1 – Recueil des discussions et des décisions du droit civil extraites des ouvrages des anciens jurisconsultes.
ARTICLES SIMILAIRES :
error: Contenu protégé.