À la fin du XIXe et au début du XXe siècle, les besoins de productivité agricole sont croissants, tout comme les progrès de la connaissance scientifique. L’État tente de transformer le modèle agricole traditionnel en modèle productiviste. En Franche-Comté, terre d’élevage, de production laitière et vivrière, l’enjeu est important. L’instruction apparaît comme un levier à la formation des jeunes enfants, futurs exploitants agricoles.
Ainsi, à l’école normale, les futures enseignantes et enseignants se voient proposer des formations en agronomie, tant théoriques que pratiques, par les enseignants-chercheurs de la station agronomique de l’université, ainsi que par les titulaires des chaires départementales agricoles. On développe alors des modalités pédagogiques de sciences expérimentales innovantes appelées « l’enseignement par l’aspect ». En effet, quoi de mieux pour convaincre et apprendre que par l’expérience ? De nombreuses écoles de Franche-Comté se prêtent ainsi au jeu de l’agronomie scientifiquement accompagnée. Diverses expériences sont menées à l’école, mais également dans les champs, à l’échelle productive de familles d’agriculteurs et avec le concours du comice agricole de chaque canton. Les élèves, comme les agriculteurs volontaires, peuvent observer par leur propres expériences les effets facilitants des engrais sur les plantes.
Résultat photographique de gain de croissance de l’avoine, présenté par les élèves de l’école de Saint-Ferjeux, dans le canton comiçal de Besançon, en 1909. université de Franche-Comté, BU Education. Emmanuel Laurent.
La bibliothèque éducation à l’institut national supérieur du professorat et de l’éducation de Besançon dispose d’un document extraordinaire qui témoigne des enseignements scolaires par l’expérience agronomique, intitulé : « Enseignement par l’aspect – Œuvres complémentaires de l’école de garçons de Saint-Ferjeux, banlieue de Besançon – Photographies des expériences culturales de 1903 à 1909 – Instituteur M. Barthe, secrétaire du comice agricole, officier du mérite agricole, officier d’académie. »
L’aspect des obtentions présentées par photographies parle de lui-même et l’accumulation des “preuves” scientifiques comparables sert vraisemblablement de conclusion empirique pour convaincre.
Protocole de gain de croissance de l’avoine, après ajout de cyanamide au champ, en 1909. université de Franche-Comté, BU Education. Emmanuel Laurent.
On observe ainsi que, sous couvert de progrès et de besoins sociaux, d’appui sur la science universitaire et de démarches pédagogiques expérimentales, on a pu conduire les enseignants et l’école normale, lieu de leur formation, à devenir les objets d’une propagande éducative. En revanche, on ne peut que louer l’ampleur de la pédagogie par projets menée à l’époque et son insertion dans le monde socio-économique.