Pour accompagner la naissance des cours d’histoire de l’art et d’archéologie, l’université de Franche-Comté a acquis, à la fin du XIXe siècle, 63 moulages et plus de 2 500 plaques de verre ou plaques à projection, mais aussi des photographies argentiques1 auprès des institutions parisiennes spécialisées dans ce domaine.
Un travail d’enquête, commencé en 2014 à l’occasion de la redécouverte d’une partie de ces plâtres dans le grenier du pavillon d’archéologie à l’UFR SLHS, a permis de sauver et de faire restaurer une partie de ces collections2. Les documents d’archives3 (Figure 1) permettent de comprendre le contexte de leur acquisition, les motivations des professeurs à l’origine de ces collections ou encore les sujets des cours dans lesquels elles étaient utilisées. Ces éléments sur l’histoire de l’histoire de l’art et archéologie permettent d’appréhender cette discipline, de construction relativement récente.
Figure 1 : détail de la facture de l’achat des moulages en plâtre via l’entreprise de menuiserie d’Émile Burgart, rue Ronchaux à Besançon (pour 575,50 francs), novembre 1889. Archives départementales du Doubs, T587.
Dans les années 1880, lorsque Eugène Nageotte4 est chargé des cours d’art grec à Besançon, les tirages en plâtre représentent l’une des meilleures méthodes pour enseigner cette discipline. En effet, les modèles en plâtre permettent aux élèves de voir directement à l’échelle les reliefs des statues qu’ils étudient (Figure 2). L’acquisition des 63 pièces de la collection s’effectue en deux temps. Le premier achat, en 1889, comprend 50 tirages reproduisant des éléments grecs, ainsi que des copies romaines d’œuvres grecques. Le second voit arriver à Besançon, le 8 mars 1892, dix autres tirages reproduisant les bas-reliefs provenant de la porte du baptistère de Ghiberti à Florence. Ils sont accompagnés de deux statues (un Démosthène, un Sophocle), et du célèbre relief de l’Athéna enlevant sa sandale (Figure 3).
Figure 2 : salle de cours de la faculté des lettres, au début du XXe siècle. Les dix tirages reproduisant les bas-reliefs de la porte du Baptistère de Ghiberti à Florence apparaissent sur le mur de droite. Archives départementales du Doubs, 68J1. L. Besançon.
Les plâtres ont été produits par les deux principaux ateliers pourvoyeurs au XIXe siècle : celui du musée du Louvre et celui de l’école nationale et spéciale des beaux-arts de Paris. Une fois acquise, cette collection reste de longues années dans la salle des conférences de la faculté, avant d’être dispersée, au cours du XXe siècle, pour des raisons inconnues. De cette collection de soixante-trois moulages, seuls six sont aujourd’hui conservés5. Après avoir été étudiés par Sophie Montel et restaurés par le centre régional de restauration et de conservation des œuvres d’art de Vesoul, ils sont aujourd’hui accrochés en salle de lecture de la bibliothèque universitaire lettres et sciences humaines, rue Mégevand.
Figure 3 : Nikè (Victoire) détachant sa sandale. Moulage n°633 (université de Franche-Comté, faculté des lettres, achat 1892, Catalogue de l’école des Beaux-arts de Paris, 1881, p. 156). Restauré en 2017 et aujourd’hui exposé à la BU lettres et sciences humaines. université de Franche-Comté, UFR SLHS. Gérard Dhenin.
L’université de Franche-Comté n’avait alors rien à envier aux autres universités du territoire, dans lesquelles des processus similaires ont été observés et analysés. Différents programmes de recherche en France et dans le monde ont montré l’intérêt, pour l’histoire de ces disciplines, d’éclairer les usages de ces objets, en cours comme dans l’élaboration de la recherche. La constitution récente d’un comité d’orientation stratégique concernant la politique patrimoniale à l’université de Franche-Comté (2019), et les travaux qu’elle mène pour la préservation et l’étude de ses différentes collections pédagogiques, permettent d’inscrire l’établissement dans cette actualité.