Docteur en médecine, professeur d’histoire naturelle, Jean Gabriel Désiré Ordinaire connaît un destin parallèle à celui de son frère Jean-Jacques1. Il est tout d’abord nommé doyen de la faculté des sciences de Besançon en octobre 1810, jusqu’en 1815, date de la suppression de la faculté, puis inspecteur d’académie à Besançon de 1819 à 1821. Cette année-là, il succède à Jean-Jacques aux fonctions de recteur de l’académie de Besançon, puis devient recteur à Strasbourg de 1824 à 18312. Il entame alors, entre 1828 et 1830, avec l’aide de Joseph Piroux (1800-1885), une expérience d’intégration des enfants sourds-muets dans les écoles communales et de formation des instituteurs à leur éducation, afin d’en scolariser le plus possible et de leur faire acquérir la lecture, l’écriture et le calcul sans la langue des signes (avant leur intégration à l’institution des sourds de Nancy).
Portrait lithographique de Désiré Ordinaire (1773-1847). Institut National de Jeunes Sourds de Paris, 11898.
Lorsque les tensions politiques et religieuses poussent le ministère à le mettre à la retraite d’office, en 1831, il est nommé par le baron de Gérando premier directeur laïc de l’institut des sourds-muets de Paris. Désiré Ordinaire introduit la parole et la lecture labiale dans les classes, mais il méconnaît la difficulté d’enseignement pour les sourds de naissance. Il rédige un Essai sur l’éducation et spécialement sur celle du sourd-muet3 (1836) où il développe une étude sur l’origine de l’écriture des voyelles et des consonnes, comparée à leur prononciation. Il conseille aux mères de continuer à parler à leur enfant sourd pour qu’ils apprennent intuitivement la lecture labiale. Entre 1831 et 1838, il tente d’imposer dans l’institut de Paris l’oralisation pure, avec des enseignants entendants non spécialisés, tout en rétrogradant les enseignants sourds-muets au rôle de répétiteurs. Les sourds-muets, avec Ferdinand Berthier (1804-1886), le premier sourd-muet à devenir professeur, sont à l’unanimité opposés à sa méthode oraliste : ils ripostent et luttent pour retrouver leurs droits. En 1838, ils obtiennent le renvoi de Désiré Ordinaire4.
Signature de Jean Gabriel Désiré Ordinaire. Archives nationales, F171721. Pierre Verschueren.
Tout comme son frère, il est reçu membre titulaire de l’académie des sciences, belles-lettres et arts de Besançon en 1811 et nommé chevalier de la Légion d’honneur. Il est en outre membre de la société d’agriculture du Doubs.
Il a plusieurs enfants, dont un fils, Hubert Joseph Édouard (1812-1887), reçu docteur en médecine comme son père. Phalanstérien fouriériste et en lien épistolaire avec le peintre Gustave Courbet, Édouard Ordinaire choisit cependant une carrière de journaliste. En mars 1848, il crée Le Journal républicain de Franche-Comté, très anti-bonapartiste. Il devient député du Doubs en mai 1869, puis préfet du Doubs lors de la proclamation de la République en 1870.
